[Le nom risque de changer, j'avais rien d'autre <.<]
Après être restée presque un an sans écrire, j'ai décidé de m'y remettre avec un recueil de nouvelles. Quel genre de nouvelles ? Je ne dis rien pour ne pas gâcher la surprise (: ...
Alors on commence avec cette première nouvelle qui n'a pas encore de nom. C'est en écrivant la première phrase de ce texte que m'est venue toute l'histoire. Et je crois que j'ai quand même de sérieux problèmes... Allez, enjoy \o
Je crois que ce que j’aime le plus chez elle, ce sont ses yeux. Malgré son sourire aguicheur, ses longues jambes et ses formes généreuses, je ne m’intéresse qu’à ses yeux. Ses grands yeux marrons m’envoûtent, sans que je ne sache très bien pourquoi. Son regard dégage une innocence presque enfantine en décalage avec tout le reste de son corps, si séduisant. C’est exactement ce que je cherche.
Lorsque j’en arrive à cette conclusion, je décide de faire plus attention à elle. Je me concentre sur ce qu’elle me dit, participe à la conversation alors que, jusqu’à présent, je n’ai fait que la fixer en pensant à ses prunelles. Je détache même mes yeux des siens pour promener mon regard sur le reste de son visage fin. Son teint pâle me fait penser à de la porcelaine. Je me demande si sa peau est froide ou au contraire chaude. L’un où l’autre, elle doit être agréable à toucher. Ses cheveux - bruns, ondulés et épais – lui tombent avec élégance sur ses épaules nues. Sa robe noire, assez courte pour dévoiler ses merveilleuses jambes me fait penser – avec aussi le fait qu’elle ait un air si triste avant que je ne me décide à l’aborder – qu’elle avait un rendez-vous, mais que la personne qu’elle attendait lui a posé un lapin. Je crois que c’est mon jour de chance.
Elle rigole à une de mes plaisanteries. Son rire est un son doux et plaisant. Apaisant, même.
- Tu ne voudrais pas qu’on aille ailleurs ? Dans un endroit moins bruyant, plus… intime.
Tout en me proposant cela, elle jette un regard vers un groupe d’hommes entrain de rigoler bruyamment.
- Avec joie, répondis-je, désireux d’être seul avec elle pour la première fois de la soirée.
Galant, je lui tends la main pour l’aider à se lever et, bien qu’elle n’en ait pas besoin, elle l’accepte avec un petit sourire aux lèvres. Sa main, si petite comparée à la mienne, est douce et froide. Un léger picotement traverse ma colonne vertébrale. Nous sortons finalement de ce bar bondé, toujours main dans la main. Le ciel sombre semble être dépourvu de la moindre étoile et il fait froid. Je tourne la tête vers Rose et lui dis que je connais un endroit parfait où nous serons au calme. Elle accepte de me suivre. Nous continuons de parler de choses à d’autres, bien que je sois à moitié ailleurs. Je pense à ce qui va se passer, comme je le fais tout le temps dans ces cas-là. L’anticipation est presque aussi excitante que l’action elle-même.
Nous passons par des ruelles sombres et peu fréquentées, ce qui ne semble pas effrayer Rose. Elle ait plusieurs blagues douteuses mais je ris, étonné qu’elle soit dotée de ce genre d’humour.
Enfin, nous arrivons dans un de mes lieux préférés sur terre.
- Un entrepôt ? demande Rose, amusée.
- Mon palace, je lui réponds. Oh, je te rassure, je n’habite pas ici. Mais j’ai un colocataire alors j’ai pensé que nous serions plus tranquilles ici.
Elle paraît ravie. Nous entrons dans le vieil entrepôt laissé à l’abandon. J’ai découvert cet endroit plusieurs années auparavant et depuis, j’y viens régulièrement. Il semble être éloigné de tout. Du bruit, des gens. Personne ne vient jamais près d’ici, ce qui me va parfaitement.
Je lâche sa main et allume une bougie que je pose sur une énorme caisse pour nous procurer de la lumière, aussi faible soit-elle. Je me tourne vers Rose. Je vois dans ses yeux le reflet de la flamme brûler lentement. Je l’aperçois renifler comme si quelque chose la gênait.
- Qu’est-ce qu’il y a ? demandé-je d’un ton dégagé.
- Oh, dit-elle d’un air étonné, comme si elle avait fait cela inconsciemment. Ce n’est pas très important mais… Tu as nettoyé cet entrepôt récemment ? Ça sent le détergeant.
- Oui. Je viens souvent ici, mais je ne suis pas une personne très propre. C’était très sale alors je me suis dis qu’il était temps de nettoyer. Ça ne te dérange pas, j’espère ?
Elle hoche la tête en signe de dénégation. Je vois briller ses yeux d’un éclat étrange, mais ça ne dure que quelques secondes.
- Et maintenant ? me demande-t-elle d’un air innocent en battant des cils.
Et voilà que ça me reprend. Ce que j’essaie de retenir depuis plusieurs heures est entrain de me submerger. Une pulsion violente que je me dois d’assouvir, car, si je ne le fais pas, je sais que je vais devenir fou. J’ai tellement envie d’elle, tellement besoin d’elle…
Elle ne semble pas se rendre compte de ces sentiments qui me dévorent de l’intérieur. Elle est trop pure, je ne peux m’empêcher de penser pour la énième fois.
- Eh bien, maintenant...
Je m’approche d’elle et prends son visage entre mes mains. Je me penche vers elle et mes lèvres frôlent les siennes. Elle ne ferme pas les yeux, se contente de fixer les miens avec intensité. Son expression est indéchiffrable.
Je ne l’embrasse pas. Son souffle froid contre le mien, je lui demande de m’attendre en fermant les yeux puis m’écarte. Je fais quelques pas sur la gauche et retrouve ce que je cherchais là où je l’ai laissé une semaine auparavant. Je retourne à pas feutrés vers Rose qui, obéissante, a les yeux fermés. Je ne signale pas tout de suite ma présence et en profite pour contempler cette femme d’une beauté extraordinaire, qui donne l’impression d’être endormie. Mais il me tarde de revoir ses yeux. Alors je lui demande de se tourner, ce qu’elle fait. Je marche tranquillement vers elle jusqu’à ce que mon torse se retrouve collé à son dos. Elle affiche un sourire tranquille.
Maintenant.
J’appuie la lame de mon couteau contre sa gorge pâle. Ses paupières frémissent puis finissent pas s’ouvrir. Elle tourne la tête légèrement vers moi et mon couteau s’enfonce un peu plus dans sa peau, ce qui ne semble absolument pas la déranger. Ses yeux rencontrent les miens.
Et ce que je vois fait retomber toute mon excitation et mon assurance.
Il n’y a pas la moindre trace de peur dans son regard. Je n’y lis qu’une certaine curiosité, comme si elle se trouvait devant un quelque chose de particulièrement intéressant et inhabituel.
Elle m’adresse un sourire poli.
- Alors, qu’est-ce que tu attends ? Vas-y, m’encourage-t-elle.
Mais je n’y arrive pas. J’en suis incapable, désormais. Elle n’a pas peur. Je n’ai aucun contrôle sur elle, bien que je tienne un couteau dont la lame tranchante est légèrement enfoncée dans sa peau. Je ne peux pas le faire. Impossible. Mes muscles refusent de m’obéir. Mon cerveau semble se vider. J’ai la nausée. Je me mets à transpirer. Mon cœur tambourine furieusement contre ma poitrine.
Rose, quant à elle, laisse échapper un petit rire aigue qui me glace le sang.
- Allons, tu l’as déjà fait auparavant, non ? « Je ne suis pas une personne très propre », hein ?
J’éloigne mon couteau de sa gorge et recule. Rose se retourne pour me faire face, l’air parfaitement détendu. Son regard dégage désormais une lueur sauvage, animale. Je bafouille quelque chose d’incompréhensible, même pour moi. Tout en me regardant, Rose attrape la bougie et l’éteint. Nous sommes désormais dans le noir le plus complet. J’entends quelque chose tomber au sol – la bougie, certainement – mais, avant que je ne puisse esquisser le moindre geste, je distingue la silhouette de Rose bouger et je suis plaqué violement au sol. Ma tête frappe le sol avec force et je laisse échapper un cri de douleur pitoyable. Dans ma chute, j’ai laissé tomber mon couteau par terre ; je suis dorénavant sans défense. Je sens le souffle de Rose à quelques millimètres de mon visage. Elle laisse échapper un bruit étrange, qui ressemble à un ronronnement satisfait.
- Qui est la proie, maintenant ? demande-t-elle doucement, ses yeux luisant dans l’obscurité.
Ses deux mains sont sur mes épaules et je sens ses ongles s’enfoncer profondément dans ma chaire. Je ne comprends plus rien. Ça ne doit pas se passer comme ça. Ce n’est pas à moi d’avoir à peur. Ce n’est pas à moi de la supplier. Alors pourquoi, pourquoi…
Je ne sais pas ce qu’elle compte me faire, mais je l’implore malgré tout de ne pas le faire. Il fait trop sombre pour que je puisse voir son expression, mais j’entends très bien son rire. Ce même rire que j’ai trouvé si doux quelques heures plus tôt me vrille désormais les tympans, puis cesse brusquement. Le silence est presque pire que son éclat de rire. Puis, elle fait quelque chose qui me désarçonne complètement. Elle écrase férocement ses lèvres contre les miennes.
Pendant les quelques secondes que dure ce baiser, toutes mes douleurs physiques et mentales disparaissent. J’en viens presque à oublier qui je suis. Mais j’ai la certitude que ce baiser est la chose la plus extraordinaire qui me soit jamais arrivé.
Mais ça se termine trop vite, beaucoup trop vite. Et lorsque ses lèvres quittent les miennes, je reprends brutalement conscience de ce qui se passe. Ma tête me fait un mal de chien, ainsi que le reste de mon corps. J’ai pleinement conscience de qui je suis, de ce que j’ai fait. Ma peur est décuplée. Mon cœur bat beaucoup trop vite, j’ai l’impression qu’il va exploser dans ma poitrine. Ma gorge est serrée par l’angoisse, j’étouffe. Je voudrais pouvoir hurler comme je n’ai jamais hurlé. Mais ça m’est impossible.
Rose susurre quelque chose à mon oreille mais je n’arrive pas à comprendre ce qu’elle me dit. Je remarque à peine lorsque ses lèvres frôlent doucement ma gorge. Par contre, lorsqu’elle plante ses dents – ses crocs ? – dans mon coup, je comprends ce qui va m’arriver.
Je peux enfin hurler et je ne me prive pas de le faire. La douleur est insupportable. Elle est entrain de boire mon sang. Je le sens quitter mon corps. Ma tête me tourne, mon corps entier me brûle. Mais je ne m’évanouie pas, je n’ai pas cette chance. Non, je reste conscient jusqu’à la fin. Et le rire effroyable de Rose est la dernière chose que j’entends avant de sombrer dans les ténèbres.